Bonjour à tous. J'espère que vous avez apprécié le 1er épisode du journal de bord d'un confiné en Afrique. Le confiné continue toujours à s’inquiéter de son Afrique ravagée par les feux du Covid19.

Face à cette crise, les besoins urgents sont de se nourrir et de protéger sa santé. Mais on a également besoin de préparer l’économie à cette reprise. C’est dans ce sens que vont les gouttes d’eau du colibri pour éteindre le feu de la crise économique. Et La goutte d’eau qu’il va verser aujourd’hui pour apporter sa pierre à l’édifice d’une nouvelle Afrique concerne la gestion de la relation de travail Salarié/Employeur. L’objectif reste toujours le même : La nécessité de réinventer un modèle en rupture avec celui actuel et adapté à notre condition.
En Europe, pour gérer la relation de travail, 2 leviers ont été actionnés : Financier (Injection d’argent) et Économique (Plan de relance de l’activité). En Afrique on ne dispose que d’un seul levier : l’intelligence économique. On doit donc réinventer un nouveau modèle économique sous les auspices de la dette. C’est la raison pour laquelle on doit être plus ingénieux; ou mieux : on doit être disruptif, c'est-à-dire en rupture totale avec le modèle actuel. L’après COVID-19 va nous obliger à innover en faisant plus, ou mieux, à moindre coûts, de meilleure qualité avec les mêmes ressources qu’avant.
Quels sont les changements majeurs à venir sur la gestion de la relation de travail salarié/employeur ? Sur quel projet devra -t-on se concentrer pour permettre la continuité du travail ? Quelles seront les temporalités de ces projets ? Immédiate en prévision d’une nouvelle vague du virus ? A moyen terme et donc plus fiable et réfléchi ?
Ce sont les questions que je me suis posé à travers 3 thématiques :
Gestion de l’entreprise : continuité immédiate de l’activité économique (PCA/PRA)
Gestion du personnel : Télétravail et accès distant au poste de travail
Gestion des documents : Archivage et accessibilité à distance (GED)
Sur chacune de ces thématiques, j’ai identifié les axes d’accompagnement économique qui devront être autant de projet à réaliser sur l’après-covid19.
I- Gestion de l’entreprise : Continuité d’activité économique dispositif immédiat
La vulnérabilité des entreprises a été mise à nue par le covid19 et leur résilience mise à rude épreuve. En cas de crise, les entreprises doivent développer 2 mécanismes de défense et 1 optionnel et solidaire :
Pouvoir Continuer l’Activité : PCA (1er cercle de défense)
Pouvoir Réorienter la Production au service du collectif : Plan intermédiaire et non standardisé (2eme cercle de défense)
Pouvoir Reprendre d’Activité au niveau normale d’avant-crise : PRA (3eme cercle de défense)
La mise en place des différentes formes de gestion d’activité en temps de crise requiert certaines compétences métiers : cartographie des processus vitaux et accompagnement risk management
1- Formes de continuité d’activité : PCA et PRA
La crise que nous vivons déstabilise les entreprises. En Afrique, plusieurs secteurs sont durement touchés notamment : l’administration Publique, le secteur minier, le secteur pétrolier, les transports, le tourisme, l’hôtellerie, la presse écrite, l’agriculture, le secteur artisanal… on peut également évoquer Les compagnies d’assurances de l’espace CIMA qui continuent à être impactées par le Covid19. En effet, la baisse drastique des activités de transport comme l’aviation civile, le transport routier, le transport en commun (la branche ‘transport’ qui se chiffrait à plus de 72 milliards de Francs FCFA), va fortement impacter à la baisse les performances du secteur, avec la fermeture des aéroports et la réduction, voire l’arrêt de certaines activités industrielles.
Et pour éviter la faillite, les entreprises doivent urgemment établir des plans de gestion des risques afin d’assurer une résilience.
PCA : Plan de Continuité d’Activité : L’objectif est de limiter la casse (comme qui dirait) liée à la survenance d’un événement extérieure susceptible de désorganiser l’entreprise. Comment ? En identifiant les activités créatrices de valeur dans son secteur et en mettant en place un dispositif organisationnel qui permette une continuité sous 24h. Il s’agit d’un exercice d’anticipation. Il faut maîtriser l’onde de choc d’une éventuelle crise et être en mesure de communiquer sur la situation de l’entreprise.
PRA : Plan de Reprise d’activité : En cas de stabilisation de la situation grâce au PCA, le PRA doit envisager la reprise afin de stabiliser ou régénérer la croissance du chiffre d’affaires. Comment ? En s’assurant que la « position » de notre cœur d’activité (activités créatrices de valeur) est toujours en adéquation avec les besoins du marché. Sur ce genre de crise comme celle que nous vivons de nouveaux besoins peuvent apparaître. Il est important pour chaque entreprise de se repositionner sur de nouveaux besoins. Il ne faut pas voir cette crise comme une fatalité mais comme l’opportunité de réinventer son business. Et pour cela, il est impératif de cartographier ses processus afin de maîtriser cette tâche et la rendre plus efficace. Le but recherché est d’être proactif, de ne pas être pris au dépourvu, même pour les risques identifiés et de s’assurer que ce repositionnement ne déclenche pas d’autres risques !
PRP : Pan de Réorientation de Production : Il ne s’agit pas d’un plan normalisé comme les 2 premiers mais issus de la pratique. L’objectif est de réorienter de façon temporaire son activité au service de la solidarité et de l’effort collectif : On voit en France des sociétés de confection de vêtement réorienter leurs services au profit de la création de masques. Des entreprises mettant à disposition leurs imprimantes 3D au service de la création des masques. Je ne vois pas cet effort en Afrique continent par essence de la solidarité. Peut-être que cela existe et que nous n’en avons pas connaissance.
Ces plans ne sont pas obligatoires mais relèvent de la stratégie d’une entreprise qui veut limiter une désorganisation et une baisse trop importante du chiffre d’affaires. Le code de travail oblige seulement les employeurs à mettre en place des mesures protégeant la santé et la sécurité des salariés.
2- Compétences requises pour gérer la résilience : Cartographie des processus et accompagnement du service des risques
La « cartographie des Processus » permet d’avoir une vue d’ensemble de l’organisation et de l’opérationnel de son entreprise. Il s’agit de :
Formaliser les interactions entre les activités, tâches, opérations et les différents acteurs participant à la création de valeur sans oublier les activités support.
Partager une vision homogène sur l’organisation
Communiquer sur son fonctionnement
Quel est son intérêt pour la mise en place de plan de gestion de la résilience ? La cartographie d’une entreprise permet :
d’identifier les activités qui permettent à une entreprise de livrer de la valeur au client.
de se projeter sur les scénarios de protection des activités créatrices de valeur en cas de crise.
L’élaboration des différents scénarios de crise possible nécessite l’accompagnement d’une équipe dédiée à la gestion des risques ou d’une personne en charge de définir les risques, les évaluer et de les prioriser. En l’absence d’une cartographie des risques, un plan de résilience perd toute son efficacité et son utilité L’axe d’accompagnement économique que nous pouvons tirer sur la thématique gestion d’entreprise est la mise à disposition des entreprises d’un accompagnement en cartographie des processus et gestion des risques afin de mettre en place des plans de résilience. Ces compétences métiers sont vitaux en cette période. Et je reste persuadé qu’au CONGO, nous disposons de ces compétences ou sinon il faut les former immédiatement car une seconde vague n’est pas à exclure.
II- Gestion du personnel : Le télétravail
Mais comment gérer le personnel pendant cette période de crise ? Doit-on les laisser confinés à la maison où mettre en place le télétravail ? La réponse à cette question n’est pas absolue mais nuancée car en fonction des contextes, nous n’avons pas le choix.
Le télétravail n’est pas une généralité. Il ne s’applique principalement que sur le périmètre de la vente de services qui sont par essence des objets immatériels (conseils, développement information, expert-comptable …) à l’inverse de la vente de produits physiques où la problématique est beaucoup plus complexe. On ne peut pas construire une maison par télétravail. Et même lorsque le télétravail est possible il peut cependant être difficile pour certains secteurs d’activités, notamment en raison d’une faible connexion internet en Afrique. Cela étant cela n’enlève rien à ce dispositif primordial et compatible avec la sécurité sanitaire et la protection des salariés.
Comment est-il mise en place ?
1- Modalités de mise en œuvre
Le télétravail n’est pas un mot magique qui va se mettre en place et fonctionner par sa simple évocation. Il faut la mettre en place avec des règles de précaution et de contrôle. Le télétravail suppose des applications techniques de travail + un accès VPN (Réseau Privé Virtuel). Il s’agit, certes de nouvelles dépenses pour l’entreprise mais vitales car indispensables à sa survie.
Il est impératif de choisir des applications techniques adaptées c’est à dire interopérables avec les autres applications de l’entreprise et surtout être équipé (pc portable, téléphone + casque). Il faut également se doter d’outils collaboratifs permettant de faire un pas dans le télétravail (Trello / Google Drive…)
L’élément le plus important est l’accès VPN au poste de travail. De nombreuses solutions existent pour les entreprises et les professionnels. Il faudra donc faire un RFC exhaustif et efficace car le VPN sera le maillon le plus important de votre chaîne de travail à distance. Assurez-vous donc que votre solution fonctionne sur l'ensemble des appareils, qu'elle soit fiable (nombreuses adresses IP bloquées pour diverses raisons).
Mon expérience dans ce domaine me permet de constater que la plupart des entreprises africaines n'en sont encore qu'au stade initial ou ne se sont pas encore suffisamment engagées pour investir dans des stratégies et des outils complets. Et pourtant, il y a généralement beaucoup à faire pour améliorer l'expérience numérique des employés lorsqu'ils travaillent en dehors du bureau. Il s’agit d’un investissement financier et matériel que l’entreprise devra concéder mais à moyen terme apparaitront des nouvelles valeurs inestimables auxquels l’entreprise pourra avoir accès : l’engagement et la motivation.
2- Les limites liées à la cybersécurité
La continuité d’un travail à distance implique un accès sécurisé aux données et à l'infrastructure de l'entreprise et aux services en ligne. En général, cet accès est assuré par une solution de réseau privé virtuel (VPN), qui se trouve sur le PC ou l'appareil mobile et crée une connexion réseau chiffrée qui permet au collaborateur d'accéder en toute sécurité aux ressources informatiques de l'organisation.
Les solutions VPN sont très variées et certains fournisseurs connus ne sont pas toujours les meilleurs en matière de sécurité. Les cyberattaques ne sont jamais autant intensifiées qu’en matière de crise. Les hackers profitent de l’opportunité pour déployer d’ingénieux mécanismes de fraude. Les 1eres mesures sont avant tout d’ordre organisationnel. Les gestes barrières seront de na pas ouvrir de pièce jointe de mails inconnus. …
L’axe d’accompagnement économique que nous pouvons tirer sur la thématique gestion du personnel en télétravail est plutôt un investissement que doit réaliser l’entreprise pour se doter d’outils et d’équipement nécessaires :
Outils collaboratifs (Trello/Dropbox…)
Équipements techniques (ordinateur portable + casque + téléphone + batteries externes pour gérer les problèmes de coupures d’électricité)
Outils VPN professionnels + cybersécurité + gestes barrières sur internet
Pour survivre à une crise l’entreprise doit certes assurer sa résilience, permettre le travail à distance mais ces actions seraient incomplètes si on ne permettait pas aux employés d’archiver et d’accéder à leurs documents de travail à distance.
III- Gestion des documents : Archivage et accessibilité à distance (GED)
La GED permet 2 choses très importantes et exclusives : L’archivage de documents papiers et l’accès des documents. L’un ne va pas sans l’autre. Pour certaines entreprises l’archivage est déjà une fin une soi. Il est clair que l’archivage des documents est un défi pour nos pays africains pour qui le zéro papier est plus un mythe qu’une réalité. L’archivage ne sert à rien s’il ne s’accompagne pas d’un accès à distance de ces documents avec tous les membres de l’entreprise pour information ou validation.
Je me demande comment doivent travailler certaines entreprises actuellement ? Comment feront-elles pour préparer une nouvelle vague qui de l’aveu même des experts est inévitable ? En mettant en place immédiatement des solutions GED. Ils existent certes des outils mais nous sommes également capables de les développer en Afrique.
Et si notre communauté scientifique cherchait des solutions informatiques à développer, en voici une, utile et pratique. Au sein de Valauris Consulting Africa, nous sommes déjà en train de travailler sur une telle solution et nous espérons que certains nous suivront. Comme je le disais dans mon dernier article, il faut certes travailler mais pas seul. Il faut travailler en équipe avec un écosystème de compétence capables d’assurer la réussite de ces solutions.
L’axe d’accompagnement économique que nous pouvons tirer sur la thématique gestion des documents de travail est la mise en place d’une solution informatique d’archivage et d’accès des documents à distance (GED).
Pour résumer, voici la liste des axes d’accompagnement que j’ai pu tirer de ma réflexion sur le nouveau modèle de la relation de travail que l’on pourrait mettre en place sur l’après-covid19.
On distingue dans ce tableau plusieurs types de solutions (assistance métiers et solution technique) qui ne sont pas forcément du ressort du numérique. Ne pensons pas que le digital puisse tout résoudre. C’est pour cela que j’ai entrepris cette réflexion.
Je lance d’ailleurs un appel à travers cet article. Ce serait une joie de lire des retours de groupes ou de personnes au Congo ou en Afrique qui penchent aussi sur les solutions que j’ai évoquées. On croit être seul, jusqu’au jour où on rencontre quelqu’un. Je l’avoue ce journal de bord est aussi une bouteille à la mer que je jette, espérant que quelqu’un partage mon fardeau pour le Congo et le sens du devoir envers le collectif.
A très bientôt pour une analyse réflexion autour des autres relations des différents pans de l’économie ci-dessous :
Relation de consommation : Consommateur / Entreprise
Relation d’enseignement : Ecole-Elèves-Etudiants
Relation d’administration d’un Etat : Administrateurs -administrés
Relation de sante : patients (Téléconsultation…)
Relation de travail dans le secteur Informel